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27 avril 2011

Images mentales

Des images de pensée. Non, il ne s'agit pas de figures de style ni d'IRM. C'est le nom qu'ont donné Marie-Haude Caraës et Nicole Marchand-Zanartu à tout un tas de griffonnages qu'elles ont collectionné. Ni gribouillage exécuté mécaniquement tandis que l'on téléphone ou se concentre sur autre chose, ni schéma à visée pédagogique, l'image de pensée est contemporaine de l'idée. Simultanée, même : comme d'autres réfléchissent à voix haute, il en est qui réfléchissent le crayon à la main. Un schéma de ce genre n'explique rien, sinon sa propre pensée à celui qui le produit. Il n'est pas destiné à être montré et le spectateur le demeure : il regarde sans voir. Dans cette profusion de flèches ou d'éléments qui font système, quelque chose se joue, prend forme, sans qu'on sache nécessairement quoi au juste, puisqu'on n'entre jamais dans la tête de l'autre. Et c'est précisément cela qui a fasciné les deux chercheuses : le mystère de l'origine de la pensée.

Bien qu'elles insistent sur le fait que ces schémas ne sont pas spécifiques aux esprits géniaux, et qu'elles en ont également récupéré d'anonymes, on aurait pu croire que leur collection d'images de pensée d'artistes ou de scientifiques célèbres –toujours des originaux– participait de l'étude génétique et sa curiosité effrénée pour les brouillons : l'idée même d'une architecture, bien avant le moindre plan ; le déroulement chromatique d'un roman de Claude Simon ; l'organisation d'une pièce de Cunningham (environ trois secondes après le début et jusqu'à ce que le livre en circulation arrive dans mes mains – sur la fin–, j'ai pensé qu'il devait y en avoir chez les chorégraphes ; spatialisation sur le papier, forcément) ; et même l'instant-papier où le chaînage de l'ADN prend forme (point de reproduction pour une question de droits). Les chercheuses se sont fait aider de spécialistes lorsqu'elles n'étaient pas compétentes dans le domaine et pourtant, n'expliquent rien à partir de ces images, comme si tout ce qu'elles avaient voulu se faire confirmer était que le spécialiste, pas davantage que le néophyte, ne peut pénétrer ces nébuleuses. Le surgissement de la pensée : voilà pourquoi il s'agit de fascination plus que d'intérêt, de collection plus que d'étude.

Alors que je sentais poindre la déception (au seuil, là, c'est un peu frustrant – parce que, oui, c'est excitant), m'est revenue à l'esprit la surprise que j'ai eue en découvrant le brouillon de Palpatine pour son essay (optique je Me Barre Ailleurs). Sous la consigne de « Give a candid description of yourself », l'espace blanc comme pour un dessin d'enfant (ou les digressions de Sterne, plutôt) était parcouru de flèches reliant des îlots de mots : la culture faisait la navette avec le luxe, quand je ne sais plus quel pôle était entouré de courtes flèches que je n'aurais pas été surprise de voir scintiller comme les panneaux convergents d'un Broadway de dessin animé ; c'est moi ! Ich bin's ! ; il y avait du blog et de l'informatique ; en marge du cadre dévolu à l'exercice, comme en dehors des frontières, se trouvaient listées quelques capitales européennes et, multiculturalisme oblige, un grand-père italien se tenait comme il pouvait à une branche de ce curieux arbre généalogique. C'est comme si je voyais circuler les globules rouges de ses multiples personnalités, celles-là même qu'il doit réunir pour la nomination de miss ouvreuse de l'année. On fréquente assidument une personne et on finit par oublier qu'elle nous reste étrangère – autre, à tout le moins. Et là, c'en était la révélation mnésique. Jamais je n'aurais procédé ainsi. Incrédule et amusée, j'ai regardé, sans lire, j'ai promené mon regard le long de ces drôles de flèches qui, contrairement aux lignes de vol d'une compagnie aérienne, mènent pourtant en des contrées familières. J'ai conclus à la déformation de l'informaticien qui a la patate et créé des systèmes from scratch. Mais finalement, ce serait tout simplement, tout mystérieusement, une image de pensée – mental, though.

10 avril 2011

After hours, ce n'est plus l'heure

After hours a fini par me taper sur le système nerveux mais trop tard pour que je n'attende pas tout de même la fin du film. Piège abscons à l'image duquel j'ai réussi à me pourrir le week-end toute seule comme une grande (looseuse). Demain, moi aussi, comme Paul, je me mettrai en face de mon écran d'ordinateur au boulot et je recommencerai une semaine sans réfléchir. Morale du film : dormir d'abord.

22 mars 2011

Soirée bien asSAISONnée

 

Présentation Arop de la saison prochaine hier soir : je me décide au dernier moment, comme d'habitude, et lorsque j'appelle pour réserver, on me répond que les listes sont déjà parties mais qu'il n'y a aucun problème, je n'aurai qu'à me présenter en arrivant. Ces pré-inscriptions, c'est vraiment pour donner à l'adhérent l'impression d'être VIPouille, et le plaisir de voir son nom stabiloté tandis qu'il en précise l'orthographe : mimylasouris, avec un y, comme Myriam (Ould-Braham).

C'est vrai que les mondanités font partie du plaisir, même si, dans ce cas précis, le monde se résume pour moi à un cercle de balletomanes-bloggueuses, qui ne s'élargit que pour lancer des offensives sur le buffet. Et je dois dire que la mini-tartelette au citron avec des éclats de pistache est si fondante qu'elle m'ôterait presque toute envie de faire ma langue de vipère, notamment sur notre Misérable préférée, dont on nous a abreuvé pendant les extraits vidéos, parce que bon, faut bien que la bande-annonce la vante un peu pour pouvoir la vendre (curieusement, quand c'est Aurélie Dupont, il n'y a pas besoin de légende).

Je découvre ainsi, après quelques minutes de Marie-Agnès Gillot en train de danser une gigue irlandaise avec son aspirateur (déjà dans le documentaire qui lui était consacré) qu'il faudra absolument que j'assiste à l' Appartement de Mats Ek, même si j'ai déjà vu la première partie dansée par le NYCB. Et si dieu (enfin le système des Pass jeunes) le veut, je prendrais bien au rabais une place pour l'opéra de Debussy, qui a l'air beau bien que statique, ainsi que pour celui des Trois oranges, de Prokofiev, ne serait-ce que pour enfin capter l'allusion dans Cendrillon, qu'on aura d'ailleurs en opéra par Rossini et en danse dans la version de Noureev, après avoir vu celles de l'English National Ballet, de Matthew Bourne et de Massenet (plus de lac, c'est un signe). Autre doublon qui risque de me titiller le neurone si je vais voir les deux : Manon, Massenet versus Kenneth MacMillan. C'est assez amusant de voir comment est pensée une programmation, même si, opéra et danse, on ne se cause pas, Brigitte Lefèvre ouvre le bal et Christophe Ghristi tarde à la le fermer.

Quand l'évaporation des plateaux de mignardises n'est plus qu'un souvenir, on nous pousse vers la sortie : Amélie, le Petit rat, Palpatine et moi finissons en beauté au café d'en face, où le fromage se trouve sous la catégorie « entracte » et où la salade au saumon s'appelle « le Lac des cygnes ». Palpatine est tout content de commander une salade « Ivan le terrible » quand la balletoman(iaqu)e refuse de manger de la verdure. Entre rongeurs, nous sommes d'accord : on s'enfile un tartare parfaitement assaisonné, servi avec des frites délicieuses, croquantes et si peu lourdes qu'on commande des profiteroles dans la foulée, histoire de faire glisser les mille et un potins que les deux balletomaniaques nous content. Merveilleux.

 

[Faut que je fasse attention, mes comptes-rendus se palpatinisent... Lui, de son côté, se met à prendre des photos bizarres avec des reflets. Si, de surcroît, comme me le faisait remarquer Miss Red, mes posts se raccourissent (relativement, faut pas déconner non plus) tandis que les siens s'allongent, je vais finir par croire qu'on déteint l'un sur l'autre.]

23 février 2011

Se gaufrer à Bruxelles

Souvenir de voyage

 

Ce week-end, j'ai mangé une pomme. Inutile de déguiser, elle avait le même goût que d'habitude. Il a plu, j'ai eu froid, j'en avais assez d'avoir l'air d'un sac à patates, je suis partie en jupe, j'ai eu très froid, la batterie de mon appareil photo s'est révélée n'être pas compatible avec celle du modèle précédent de Palpatine, j'ai râlé, j'ai eu froid, je lui ai piqué son appareil, la section moderne du musée des Beaux-arts était fermé pour rénovation, je n'ai pas vu les tableaux de Khnopff, qui comptaient pour un tiers de ma motivation (gaufre et Magritte pour les deux autres), je me suis fait avoir avec les contingents de place du musée Magritte, je n'ai eu qu'une heure pour le visiter, j'ai encore eu froid, la nuit tombait tôt sur la brume et la bruine, la ville n'est pas très souriante en-dehors de son centre, j'ai eu froid et j'ai été épuisée.

 

 

Pourquoi faudrait-il toujours réussir tout de son voyage ? Quadriller la ville pour avoir tout vu et surtout rien loupé ? Aimer ce qu'on découvre plutôt que la découverte ?


 

De ce week-end, j'ai peut-être préféré le voyage à la destination / la fin d'après-midi et la fin de la nuit à l’hôtel dans les coussins adossés au miroir / la chemise à boutons de manchette de Palpatine / le brunch au saumon, fabuleux œufs brouillés, thé orangé et brioche aux morceaux de sucre, partagé avec Ariana / ce plaisantin rêveur de Magritte / le livre un peu daté mais enfin sur Khnopff / l'attente d'une averse musardée dans une boutique de Cds classiques, musique religieuse, et juste en face, les vitraux d'une église / feuilleter les dessins de Khnopff dans une salle commune de l'hôtel / attendre sur un fauteuil-caisson que l'opéra d'Ariana et Palpatine se finisse et les achève, tandis que je somnole en toute bonne conscience de touriste épuisée, entre les voix qui traversent les murs et les ouvreurs comme des garçons de café qui s'ennuient.


Je suis pessimiste, dit Palpatine et je trouve ça curieux quand on parle du passé immédiat (perfectionniste, plutôt, lorsque le moindre détail peut défigurer l'ensemble). Mais il suffit qu'il s'éloigne un peu (le passé immédiat, pas Palpatine) pour que je puisse dire qu'il est bon de se gaufrer à Bruxelles et que c'est rendre hommage à cette ville que d'imiter sa spécialité1.

 

  1Nous avons également honoré les moules-frites comme il se doit. Parfaitement conforme au régime : pas de dessert après les moules-frites à volonté (il a bien fallu en reprendre pour le vérifier) et pas de chantilly ni chocolat fondu sur la gaufre, juste un cheesecake au spéculos comme dernier dîner.