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15 juillet 2009

Après le tremblement de terre

 

De Haruki Murakami

 

 

« En rentrant du bureau ce soir-là, Katagiri trouva chez lui une énorme grenouille qui l’attendait. Dressée sur ses deux pattes arrière, elle faisait bien deux mètres de haut.

[…]

- Bien sûr, comme vous pouvez le constater, je suis un authentique batracien. Je ne suis ni une métaphore, ni une allusion, ni une image de synthèse, ni quoi que ce soit d’aussi compliqué. Je suis une vraie grenouille. Vous voulez que je coasse un peu pour voir ? »

 

 

Je suis toujours perplexe en refermant un livre de Murakami, mais j’ai toujours autant de plaisir à le lire.

Parfois, il ne faut pas chercher à comprendre. C’est ou c’était écrit, voilà tout.

 

 

« Mais comme l’a découvert Ernest Hemingway, ce qui décide de la valeur ultime de nos vies, ce n’est pas la façon dont nous remportons la victoire, mais la façon dont nous sommes vaincus. »

 

 

Quoiqu’il en soit, je suis en vacances.

 

 

« Dans une sorte de brouillard, il vit l’homme s’approcher de lui, le pistolet à la main. « Je vais mourir », se dit-il. La véritable peur, c’est celle que les hommes éprouvent envers la force de leur imagination, avait dit Crapaudin. Sans hésiter, Katagiri coupa le bouton de réglage de son imagination et sombra dans un silence paisible et plein de légèreté. »

 

Ce genre de passage peut certes encore déclencher un « Hobbes ! » en pop-up dans mon cerveau, mais l’idée de reprendre le livre et d’y chercher échos et correspondance est demeurée au stade de velléité, pas même de volonté avortée. En vacances, je vous dis.

 

 

14 juillet 2009

La Fille mal gardée, de Frederick Ashton

 

Myriam Ould-Braham as Lise

 

Samedi soir, dernier ballet de la saison, place de dernière minute au premier rang de l’orchestre, je vous prie : parfait pour étendre ses jambes, voire de près les mimiques des danseurs, et surtout rire après les déboires de la veille (qui feront l’objet d’un prochain post, je remonte dans le temps – mais je m’arrêterai avant d’avoir l’air de vous faire le coup de Benjamin Button, promis).

 

Suivre le ruban de l’histoire

 

Myriam Ould-Braham et Mathias Heymann

On pourrait presque faire tout le ballet on se raccrochant au ruban comme fil directeur. Il y a tout d’abord le ruban rose avec lequel danse Lise, qu’elle noue à une poignée dans la cour de la ferme, puis que Colas trouve et noue autour d’un bâton, épée paysanne qui se retrouve aux couleurs de sa dame.

Heymann - je n'ai pas trouvé de photo d'Emmanuel Thibault

Lorsque les deux amoureux se retrouvent à l’insu de la mère de Lise, le ruban tisse desliens entre eux, matérialise la vieille métaphore des chaînes de l’amour, et c’est très commode pour s’enserrer, et manœuvrer l’enlacement jusqu’au baiser, tout en restant dans un registre très enfantin : on en joue comme on jouerait d’une corde à sauter, en serpentin à ne pas écraser, en ligne à franchir… prémisses de la GRS comme badinage innocent.

 

 

On ne peut manquer alors de remarquer en contraste l’absence totale de lien avec Alain, le fils d’un riche fermier (Thomas), que Simone, la mère de Lise, veut lui faire épouser. Seul ruban octroyé : un mors qui se prolonge en rennes pour freiner les ruades de ce jeune homme – canasson.

 

Démultiplication des rubans lors de la fête paysanne, où Thomas et Simone tentent un rapprochement entre Alain et Lise qui pour sa part repart prestement vers Colas dès qu’elle peut. Leur manège trouve alors un écho dans celui des paysans, déployé autour d’un mât bien fourni en rubans, au bout desquels paysans et paysannes mène une farandole enjouée sans jamais s’emmêler les pinceaux (mais une des villageoises tirait une tronche pas possible, et une autre souriait par intermittence, comme si sa bouche était agitée par un mauvais contact électrique). Puis Lise se substitue au mât, et dans un bel équilibre, se laisse emmener par les rubans en promenade attitude.

 

 

 

Je n’ose même pas imaginer le casse-tête des répétitions et encore moins celui du chorégraphe, qui a du régler les innombrables déplacements en faisant toujours en sorte que les croisements ne conduisent pas à une impasse inextricable. D’une manière générale, les accessoires sont toujours motifs d’angoisse : ruban qui glisse, ne se dénoue pas quand il faut, ou avec retard, mais aussi éventail qui ne s’ouvre pas, ou pas du bon côté, voire qui se casse. Mais là, tout est fluide et de maniement apparemment aisé. Pas d’inquiétude, les danseurs ont les choses bien en main.

On ne peut pas en dire tout à fait autant des personnages qui se font surprendre par un orage : retour rapide à la maison pour Lise, qui s’y fait enfermer par et avec sa mère. Le fil à tisser remplace le ruban à badinage, mais Lise ne se débarrasse pas pour autant de sa mère en la ligotant avec fil à la manière d’un chaton qui emmêlerait une pelote de laine autour d’une chaise. Un bref répit lui est cependant accordé par la somnolence de Simone, et c’est l’occasion d’un pas de deux très original, où Colas, depuis l’embrasure de la partie supérieure de la porte fait danser Lise, qui s’aide de la porte pour relancer une série de tours au doigt.

 

 

Simone finit cependant par s’éclipser après collecte de la moisson (danse enjouée des paysans rythmé à coup de bâtons, nouveau lien) pour aller chercher le notaire, et sans avoir en avoir eu vent, elle va récolter la tempête, puisqu’entre les boisseaux de blés déposés par les paysans se cache Colas. Que Lise, à son tour cache dans sa chambre au retour de sa mère. Qui devant l’indiscipline de sa fille, l’enferme dans la chambre. La punition n’est évidemment pas pour qui croit, et l’on imagine de là assez aisément le dénouement : lorsqu’on découvre le couple enlacé au moment de faire descendre la jeune fille pour célébrer le mariage avec Alain, le contrat est déchiqueté avec rage par Thomas (ou le notaire, je ne sais plus) – et jubilation pour tous les autres. Le mariage est bien célébré et all is well that ends well, puisque c’est avec Colas.

 

Ire et rire

 

L’histoire contient donc un énorme potentiel de niaiserie, et pourtant le ballet ne l’est pas (niais), soit qu’elle (la niaiserie) soit contrebalancée par des touches d’humour, soit qu’elle devienne elle-même comique. Ce second cas pourrait être illustré par Colas, lorsque les marques d’affection ou de badinage deviennent too much, et le premier par Alain, personnage comique par excellence.

 

ici, Simon Valastro (pas trouvé Allister Madin non plus)

Il est timide jusqu’à la maladresse, complètement empoté et en même temps parfaitement grossier : il faut que son père le porte jusqu’à Lise qu’il n’ose pas approcher, mais sitôt qu’il lui a flanqué le bouquet dans la tête, il tâte du corset. Ses gestes raides et brutaux font de sa déclaration une parodie délicieusement ridicule. Allister Madin est véritablement excellent dans ce rôle, sûrement plus difficile qu’il ne paraît, puisque la maladresse du personnage ne peut paraître que si la technique du danseur est irréprochable et parfaitement en mesure. Les accessoires et costumes jouent également : les ruades avec un parapluie rouge en guise de cheval de bois déclenchent à chaque fois le rire, et Thomas réconforte son fils en tournicotant de ses doigts la petite houppette de la perruque de son pauvre choupinet privé de mariage (et donc de dessert, puisque Lise paraissait fort à son goût).

 

 

Autre personnage burlesque d’essence : Simone, la mère, dansée par un homme travesti. J’essayais hier sur msn d’expliquer à Yannick, étonné qu’on puisse rire devant un ballet, en quoi celui-ci était comique. Comme je n’y arrivais pas bien, je l’ai envoyé sur youtube, et il a eu cette formule « ah, je vois, c’est par grossissement théâtral ». J’ai trouvé cela très juste. Il y a bien sûr du comique de répétition, mais le rire est initialement déclenché par des gestes exagérés, démesurés : tout est outré –sauf le spectateur. Et Simone, avec sa colère contre sa fille, fait tout à fait partie de cette outrance débonnaire. Il faudrait citer presque chaque geste et chaque mimique d’Aurélien Houette, tordant, son étranglement lorsque Lise file la laine, sa peur dans la charrette qui la/le fait s’accrocher au bord… mais comme c’est impossible, on s’offrira de revoir son morceau de bravoure : la danse des sabots. Je me demande si cette danse trouve son origine dans les fêtes paysannes, et dans quelle mesure elle n’est pas reconfigurée comme un morceau de claquettes (si une balletomaniaque passe par là…). Quoiqu’il en soit, c’est amusant, et l’air est particulièrement tenace une fois qu’on l’a dans la tête.

 

 

Parmi les nombreux autres éléments comiques, il faut également mentionner les poules et leur coq, qui ouvrent le ballet et donnent d’entrée de jeu le ton de cette « comédie pastorale ». Tout en dérision, pas de place pour l’ironie amère : l’on peut rire franchement. Et je dois dire que je ne m’en suis pas privée (tout comme une femme derrière moi, joyeusement bruyante). Je crois bien qu’au-delà de la chorégraphie elle-même, c’est Myriam Ould-Braham dans le rôle de Lise, qui m’a le plus fait rire. Elle joue de tout, et la pantomime qui amène parfois des longueurs dans d’autres ballets devient ici l’occasion de mines impayables. Le premier quart d’heure où Lise goûte avec ravissement la crème qu’elle a préparée, se fait couvrir de poussière pour s’être cachée contre l’escalier au-dessus duquel Simone secoue les tapis, et fait des moues impossibles m’a déclenché un fou rire que j’ai étouffé à coup de pull (que voulez-vous, on ne peut plus rire sous cape à moins d’être un pottermaniaque). Et puis lorsqu’elle dans le deuxième acte elle boude sur le canapé ou descend l’escalier en se laissant glisser sur les fesses, et puis, et puis…

Rien à dire, elle est vraiment géniale, excellente comédienne, et sa technique irréprochable devient énergie enjouée ou innocente. Et je ne suis pas la seule à le penser - cf entre autres cette critique dont je partage l'avis concernant Myriam Ould-Braham : c'est également son travail de bras qui m'avait frappé la première fois que je l'ai vue, dans du Forsythe. Avant de la voir, lorsque je lisais les critiques dithyrambiques dans les magazines de danse, et que j'observais les photos, je n'arrivais pas à imaginer comment elle pourrait faire un tel effet. A présent... même lorsque d’autres dansaient, je préfére parfois la regarder. Et pourtant Emmanuel Thibault faisait un partenaire à la hauteur, tout aussi présent et vif (quoiqu’il ait un peu un regard ahuri, ce que je n’avais jamais remarqué pour n’avoir jamais été aussi près, et qu’on lui pardonnera d’autant plus aisément que cela lui donne un air sympathique). Autre exception à la constante observation de Muriel Ould-Braham : le danseur à la flûte, Mickaël Lafon, lumineux, exceptionnellement bien fait de sa personne (peut-être trop d’ailleurs – est-ce vraiment grâce à sa présence qu’on le regarde tant ?).

 

En résumé, un ballet très drôle, bourré d’humour, et une programmation formidable. Ce n’est pas l’humour anglais dans ce qu’il a de pince-sans-rire, mais les danses villageoises ont une tout autre tournure que la joie sérieuse du premier acte de Giselle, par exemple. Le seul autre ballet d’Ashton que j’ai vu est le Lac des cygnes, lorsque l’English National Ballet était passé au château de Versailles, et déjà la chorégraphie m’avait semblée plus « enjouée » que la version Noureev. Bref, j’aurais bien envie d’en voir d’autres…

 

Si jamais cela vous a rendu curieux, le ballet dansé par le Royal Ballet est intégralement sur youtube : have a look.

 

 

13 juillet 2009

Harry Potter and the Half-blood Prince

Daniel Radcliff, toujours la même tête de gamin

Hier matin, cour Saint-Emilion, 9h45 (la gueule un peu enfarinée pour cause d’opéra la veille – billet à venir, je fais tout dans le désordre, as usual), parmi la foule de gens munis d’invitations, on dégaine les billets dégotés par Palpatine pour une avant-première de l’avant-dernier film de la série. J’aime toujours autant l’univers de J.K. Rowling, même si je ne sombrerai jamais dans la pottermaniaquerie, comme certains spectateurs, véritables équivalents des supporters pour les matchs de foot, habillés de pied en cape aux couleurs de Gryffindor et Slytherin – on notera d’ailleurs que Ravenclaw et Hufflepuff peuvent aller se brosser ; rien à faire, la manichéisme a de solides racines.

Les plus gartinés des supporters de Griffindor sont-ils les personnages (Luna et sa tête de lion) ou les spectateurs ?

 

 

L’adaptation m’a semblé très réussie, même si je n’avais plus exactement le livre en tête (ou peut-être est-ce bien plutôt grâce à cela). Au-delà du quatrième tome, j’ai un souvenir linéaire de l’intrigue et du mal à savoir dans quel tome se situe chaque péripétie. En même temps, c’est assez logique, puisque cela correspond au moment où j’ai arrêté de les relire.

Le dosage entre décor du monde de Hogwarts, portrait des personnages et action est excellent, fournissant ce qu’il faut de contrepoints comiques avec les débuts sentimentaux du trio infernal : la nunucherie de Lavender est impayable, la salle était morte de rire devant la niaiserie de Ron sous le coup du philtre d’amour (surtout que Rupert Grint fait plus vieux que les deux autres, pour le coup), et Hermione qui, pour éloigner son cavalier, se jette sur les petits-fours quand elle apprend qu’ils font une haleine de chacal – « oh, on second thought ! ».

 

 

Pourtant, malgré ce caractère assez composite, l’ensemble n’a pas l’allure d’un patchwork ; certains motifs visuels créent une véritable cohérence. Ainsi, par exemple, les déplacements des Death Eaters dans les airs trouvent un écho dans le générique final (même s’il me fait également penser à celui de Il était une fois, aussi étrange que cela puisse paraître) et dans les volutes des souvenirs qui se diluent dans la pensine – bon moyen en outre de leur conférer un caractère menaçant.

Ok, la caractère menaçant n'apparaît pas du tout sur cette photo aux couleurs chaudes

 

D’une manière générale, l’ambiance est plus « noire » que dans les films précédents, sans en rajouter des tonnes – sauf au début, où j’ai eu un peu peur de la gratuité de l’usage intensif des effets spéciaux : la plongée dans Londres vous donnait l'impression d'être dans une attraction du Futuroscope et nécessitait d'avoir bien petit-déjeuné, tandis que la destruction du pont sur fonds de ciel pré-débarquement de forces obscures dégageait des relents de War of the Worlds… Très vite, le côté film d’action est bien tempéré par celui de polar (les contrepoints comiques appartiennent de droit au film d’action – c’est vrai, même et surtout quand il est à deux doigts d’y passer, le scénario prévoit toujours une petite pique pour Bruce Willis) : silhouette très réussie de Malfoy et excellent choix que l’acteur de Tom Riddle jeune.


 

Tom Riddle

 

Avouez que la veste lui donne un peu de carrure


A la sortie, un gamin devant disait avoir préféré le troisième opus. S’il est l’un des films qui m’a le plus plu dans la série, celui-ci l’est tout autant (contrairement au dernier qui ne m’a pas laissé un souvenir impérissable : j’ai mis du temps à me rappeler si j’avais ou non vu les jérémiades du début de l’ordre du Phénix). Quoique de manière différente, dans des ambiances qui n’ont rien à voir, l’un et l’autre parviennent à en faire un monde cohérent proche du notre ; seulement, là où ce rapprochement se faisait à coup de fringues actuelles (plus de gilet à capuche rose pour Hermione, quoique encore vêtue de rose pale, mais plus discret. En revanche, pendant qu’on parle chiffon et couleur rose, il faut signaler la robe de Luna - un grand moment), il se fait à travers les codes du polar.

En bref, c’était une chouette adaptation, dont le seul bémol pourrait être d’avoir un peu trop appuyé les indices contenant en germe la résolution de l’intrigue (loooon plan sur Snape : trahison ou fidelité au-delà du supportable ? // la magie laisse des traces sur les Hoxcruses – oh tiens, mais la cicatrice en éclair ? etc.). A moins que ce ne soit tout simplement du à ce que l’on va voir le sixième film en ayant lu le septième livre et que ce qui n’était qu’indice devient alors une évidence qui saute aux yeux. Non, vraiment, le seul véritable défaut de cette séance ciné ne tenait pas au film mais au son de l’UGC : j’ai bien cru que j’allais devenir totalement sourde, même en me bouchant les oreilles aux moments violemment sonores (c’est-à-dire globalement dès qu’il y a de la musique et de l’action, c’est-à-dire en fait la moitié du film) – le volume des dialogues était supportable, quand bien même on entendait encore très bien les mains sur les oreilles. Mais, bon, ce n’est pas cela qui allait me faire bouder mon plaisir…

 

 

 

10 juillet 2009

Recalée.

(Titre explicite pour Dre qui ne peut lire que cela sur son ordi - le déversement de fiel est à venir sous peu, quand j'aurai dormi)