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13 novembre 2016

Oh, Mademoiselle !

Avec Mademoiselle, Park Chan-Wook (le réalisateur de Stoker) nous entraîne joyeusement dans son sillage jusqu'à un point où, toute l'histoire semblant être remise en cause, on reprend depuis le début d'un autre point de vue, jusqu'à revenir au même point de butée, dépassé dans une troisième partie échevelée… Le storytelling est parfait, parfaitement jouissif.

Certes, on peut s'étonner de la naïveté excellemment feinte de la domestique entrée au service de Mademoiselle pour récupérer une partie de sa fortune dans un coup monté, et je me suis demandée pourquoi diable la corde pendue à l'arbre alors qu'elles fuyaient, mais il n'en reste pas moins que le premier renversement m'a prise par surprise. Et j'ai douté à nouveau ensuite, quoique dans une moindre mesure. Je n'en dirai pas plus au risque de vous gâcher le plaisir - réel, car tout est délicieux dans ce film virtuose : les plans (façon gothic novel très colorés), les actrices (Kim Min-Hee & Kim Tae-Ri) et les scènes de sexe (fort ludiques). Je me suis régalée*. 

* Heureusement, parce que la salle du Majestic est de loin la plus pourrie où j'ai jamais mis les pieds, toute de guingois, avec des sièges de biais par rapport à l'écran, qui obligent à choisir entre sacrifier sa nuque ou son dos…

 

08 novembre 2016

Him, Daniel Blake

I, Daniel Blake n'est pas La Part des anges. On ne rit pas dans le dernier Ken Loach. Surtout pas de l'absurde que l'administration a su élever au rang d'art. Daniel, à qui l'on a refusé une pension d'invalidité, se voit également refuser de faire appel à cette décision… parce que le refus ne lui a pas été notifié. Coincé dans une boucle temporelle qui ressemble furieusement à un nœud coulant, il voit sa situation se dégrader sans pouvoir rien faire d'autre que d'aider son prochain - en l'occurrence, une mère de famille seule, qu'il a rencontrée à Pôle emploi et qui, malgré le toit qu'on lui a offert (il faut voir en quel état), ne s'en sort pas.

Tendresse pour les personnages, virulence contre la société, notamment à propos de "la mascarade" humiliante que l'on impose aux demandeurs d'emplois, alors que le chômage est dans une large part structurel. Ken Loach détaille la chute d'un homme qui refuse de déchoir, avec une rigueur a-sentimentale qui rappelle Amour de Haneke : même difficulté à ne pas chialer, même refus de chialer alors que le personnage principal reste digne, lui, une dignité sans raideur ni grandiloquence, simple et lumineuse, comme l'était celle d'Une belle fin, d'Uberto Pasolini. On y sourit pareil, de compassion, pour s'empêcher de chialer devant cette misère dont on sait, parce qu'elle est filmée sans misérabilisme, qu'elle est réelle.

01 novembre 2016

Bridget Jones 3

Jamais 2 sans 3 ou les plus courtes sont les meilleurs, Bridget Jones Baby balance, comme son héroïne entre Patrick Dempsey et Colin Firth - comme d'hab', a-t-on envie de dire, sauf que cette fois, il est au moins autant question d'ADN que de coeur puisque Bridget ne sait pas duquel elle est enceinte. Du coup, malgré quelques bonnes répliques et une caricature fun des petits jeunes en hipsters, je trouve ça tout de suite moins drôle (même s'il ne faut pas occulter que les deux premiers films étaient déjà moins drôles que les bouquins). Ce qui était mignon à 20 ou 30 ans l'est nettement moins à 40 ans, où la loose botoxée commence à virer au pathétique. À force d'être vu et revu, cela ne ressemble plus à grand-chose. OK, c'est haut en couleurs, on ne s'ennuie pas, mais tout de même, ce bordel, ça commence à être fatigant et on espère ne pas en être là dans 10 ans. Alors on rit encore un peu, oui, mais parce que ça craint. Bien plus que le pull-renne de Noël qu'on retrouve en forme de clin d'oeil à la fin du générique (de la salle blindée, j'ai été la seule à en profiter). 

16 octobre 2016

Le cul entre deux océans

Aussi pressé et tiré par les cheveux soit-il, le mélo fonctionne toujours sur moi, pourvu qu'il dévaste de beaux visages dans des paysages à la dimension de la tragédie (fut-elle intime). Une vie entre deux océans (océan de culpabilité, océan d'amour) remplit le cahier de charges en échouant une embarcation sur une île quasi-déserte, à l'exception de Michael Fassbender et Alicia Vikander, gardiens du phare.

Un mauvais choix, suivi d'un autre mauvais choix allant à l'encontre du premier, et le visage lumineux d'Alicia Vikander (auquel j'associe la vitalité de Mathilde Froustey, à qui elle me fait toujours autant penser) se referme tandis que celui de Michael Fassbender joue la polysémie : le mutisme de l'homme qui rend son entourage serein en s'occupant de tout en vient à cacher-révéler la culpabilité qui le ronge depuis bien avant les faits, son passé de soldat comme péché originel. Cet homme a ce truc qu'ont peu d'acteurs : une profondeur épidermique, la capacité de tout suggérer par une chorégraphie d'infimes mouvements.

Pour l'épanouissement lacrymal et soupirant du spectateur, le duo est complété par Rachel Weisz, magnifique en mère éplorée. J'ai écrasé ma petite larme et j'ai même trouvé plus joli que cliché ce mantra de résilience : on ne pardonne qu'une fois, quand tenir rancune est un travail de ressassement, de tous les instants. Amen et bon vent.