29 mai 2014
Le Promeneur d'oiseau
Un joli film pour citadins pressés : le promeneur d'oiseau éponyme est un grand-père qui entreprend un périple pour retourner dans son village natal, accompagnée par sa petite-fille, mal élevée, voire pas élevée du tout par ses parents homme et femme d'affaires qui l'occupent plus qu'ils ne s'en occupent. Évidemment, quand on fait attention à elle, la gamine finit par devenir beaucoup moins infernale et même par abandonner son iPad pour écouter son grand-père lui raconter l'histoire de sa vie – un vie un peu manquée mais vécue avec une sérénité qui gagne peu à peu le spectateur, à mesure que l'on s'éloigne de la ville pour pénétrer la Chine rurale. Malgré la splendeur architecturale du Pékin moderne, c'est dans la forêt de bambou que traverse le duo que l'on a envie de se perdre, pour écouter du Messiaen à l'état de nature et goûter aux bols de nouilles ou de riz que s'enfilent les villageois et qui font bien envie à huit heures du soir. La soirée s'est naturellement finie rue Sainte-Anne par un guydon goulument avalé, sans égard pour le mélange chinois-japonais.
19:04 Publié dans Souris de médiathèque | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinéma, le promeneur d'oiseau
Parris
Le Paris de Martin Parr, ce sont les petites tours Eiffel que l'on achète mais que l'on ne photographie jamais et surtout, surtout, les touristes qui achètent lesdites petites tours Eiffel. Ce sont les mêmes qui photographient le Louvre au bout de leur smartphone, quand ils ne photographient pas les gens qui photographient le Louvre au bout de leur smartphone, à la Martin Parr. Zut, on s'est fait avoir, il nous a eu, Palpatine et moi. Mais comment ne pas aimer se faire épingler par Martin Parr ? There is only one thing in the world worse in the world than being talked about, and that is not being talked about. Tous les mêmes, souligne la tendre ironie du photographe. Oui mais, tous dignes d'attention. Et de dérision.
Vous ne vous étiez jamais demandé ce que ça fait d'être une petite tour Eiffel ou un gadget lumineux posé à même le sol ?
18:15 Publié dans Souris de médiathèque | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : exposition, photo, mep, martin parr
28 mai 2014
Is the man who is tall happy?
Gondry et Chomsky : voilà une association qui a aiguisé ma curiosité. Je ne voyais pas trop ce qui pouvait inciter le réalisateur-bricoleur à traîner avec le célèbre linguiste – dont je ne savais pas qu'il était aussi un militant anarchiste. C'était oublier la curiosité du cinéaste touche-à-tout pour les processus psychiques, qui donne sa trame à The Eternal Sunshine of the Spotless Mind. Gondry questionne Chomsky tous azimuts, moins avide de comprendre que de donner du grain à moudre à sa créativité. En effet, si la conversation est animée, c'est surtout parce que Gondry a tout mis en image, interview et apartés plus ou moins méta compris (les extraits filmés, rares, sont mis en scène par le bruit d'une vieille caméra et intégrés à l'animation). Le résultat requiert une grande force de concentration, moins à cause de la complexité du propos (qui devient simple lorsque l'on ferme les yeux quelques secondes) que du foisonnement visuel à travers lequel il est abordé1. Gondry a clairement horreur du vide : les lignes de ses dessins ne cessent de sillonner l'écran, et l'illustration des concepts tourne rapidement à l'ornementation. Pourtant, dans le moment même où il empêche d'aborder réellement la complexité d'une pensée, ce fourbi témoigne d'un tel enthousiasme qu'il donne envie de s'y pencher et de se mettre à fouille, en quête de nouvelles idées pour alimenter la machine à rêver et à penser. Conversation animée avec Noam Chomsky : on a rêvé qu'on se mettait à penser... un joli rêve, dont on essayera de se souvenir une fois éveillé.
Mit Palpatine
1 Et, il faut bien le dire, de l'accent horriblement franchouillard de Michel Gondry, malgré plusieurs tournages anglophones.
23:42 Publié dans Souris de médiathèque | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, cinéma, gondry, chomsky
25 mai 2014
Les Capulet et les Montaigu
Photo Ch. Pelé
Bien sûr, dans Les Capulet et les Montaigu, il y a Roméo et Juliette. Mais ce n'est pas l'essentiel, ce n'est pas l'histoire d'amour qui est au centre de l'opéra de Bellini, ce ne sont pas deux individus mais deux familles et, moins encore que deux familles, deux clans, deux clans masculins pris dans une guerre dont ils n'arrivent pas à sortir, pas même Juliette, à qui Roméo propose de fuir, et qui se trouve prise au piège de l'honneur, cet honneur masculin, viril, cet honneur macho et princier, qui nous rappelle pourquoi Roméo et Juliette ne pouvaient qu'être italiens. Derrière les voix pures qui s'élèvent, on entend les remous d'une époque, d'une société, toutes vicissitudes qui sont peintes à grands traits vibrants dans la musique de Bellini et sur les hautes palissades qui ne sont pas la moindre des beautés de la mise en scène de Carsen, avec ses duels au ralenti et sa gerbe d'épée et de sang initiale, avant que les membres du clan Capulet viennent un à un retirer leur Excalibur, fiers et résignés. C'était magnifique.
Mit Palpatine
23:31 Publié dans Souris d'Opéra | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique, opéra, bastille, bellini, les capulet et les montaigu