19 janvier 2014
Vallotton
Des scènes intimes qu'aurait pu choisir Degas, des scènes de théâtre à la Hopper, des chignons façon Toulouse-Lautrec, un portrait d'Émile Zola à la Mucha, des ombres et des nuages comme des boyaux de Dali, un tableau de Verdun futuriste... on a du mal à croire que tout cela a été peint par le même homme. Félix Vallotton, tout à la fois romancier, dramaturge, graveur et peintre, est passé d'un sujet à l'autre sans se soucier de continuité stylistique – ni même de rupture : je n'ai pas fait assez attention aux dates pour en être certaine mais il ne semble pas y avoir de périodes distinctes dans sa peinture, que le commissaire a donc choisi d'exposer par thématiques transversales. À chaque salle, c'est un peu la surprise – quand ce n'est pas d'un tableau à l'autre.
Valse
Quand le pointillisme se fait paillettes... Juste wow !
Je ne m'étonne plus de ne pas connaître le peintre : pour se faire (re)connaître du grand public, mieux vaut avoir un style identifiable. Or celui de Vallotton est particulièrement difficile à cerner. On ne peut même pas dire, comme pour Gerard Richter, artiste contemporain qui passe sans transition de la peinture hyper-réaliste d'après photographie à des séries abstraites qui n'ont encore rien à voir les une avec les autres, que son style se définit par une absence de style, visant l'objectivité. Il y a au contraire chez Félix Vallotton une multiplicité de styles, qui ne sont pas pour autant des explorations techniques comme c'est le cas chez Signac, par exemple, qui cherche ce qui, du point, du trait ou de la ligne, restituera le mieux la couleur et la vibration de la vision. On dirait que Félix Vallotton ne cherche rien, ne se dirige nulle part, essayant seulement à se débarrasser de ses tracasseries. Apparemment, il n'a pas eu un rapport aux femmes aisé et cela s'en ressent dans ses tableaux de couples, où la femme n'a pas le beau rôle, et dans certains de ses nus féminins, où la chair a quelque chose de massif, comme lourde de menaces. (En même temps, si je puis me permettre, à en croire ses autoportraits, ce n'est pas le charisme qui l'étouffe.)
Portraits
Les Cinq Peintres (Vallotton se trouve debout, à gauche)
J'ai un peu l'impression qu'ils jouent à qui a la plus grosse (barbe).
Félix Jasinski tenant son chapeau
(Cet homme me fait penser à un camarade de lycée de manière assez frappante...)
J'aime beaucoup la signature de Vallotton, en haut à droite, dans une police qui évoque la gravure, avec juste la hampe du F et du V qui partent en arabesque.
Portrait de Zola
Ne trouvez-vous pas que les contours marqués donnent un côté Mucha au portrait ?
Nus
La Femme au perroquet
Olympiaa, Olympiiiiiia, Maaaanet, Maneeeet, Olympiaaa... J'ai ri devant ce perroquet qui radote sûrement moins que les spectateurs devant ces hoquets de l'histoire de l'art.
La Blanche et la Noire
Le Sommeil
Les hanches font un drôle d'angle (et la couette a la même forme curieuse que l'épaule d'un autre nu féminin).
L'Automne
(Pas certaine d'avoir envie que toutes les feuilles tombent.)
Le Bain turc façon American college
Le Bain au soir d'été
Entre nous, je trouve ce tableau assez affreux mais il paraît qu'on a beaucoup de chance de le voir (certains ont dû être touchés par les rayons de la grâce divine, en haut du tableau).
Étude de fesses
Autant dire que, placé à côté d'une nature morte de jambon, cela fait rire tout le monde.
Scènes de la vie théâtrale et intime
La Loge de théâtre
Hopper style
Le Provincial
Il faut au moins la plume de cette élégante et le rideau de droite pour mettre en scène en scène cet homme plutôt banal.
Le Dîner
Vallotton, de dos, face à sa belle-fille. Ambiance.
Femme fouillant dans un placard
Fouillant, pas rangeant.
Misia à sa coiffeuse
Le seul tableau que je connaissais déjà (sûrement vu au musée d'Orsay).
Le Mensonge
On détourne les yeux de tout ce rouge et l'on voit... ce titre rabat-joie. De belle illusion, l'amour est devenu un mensonge, qui emprisonne entre deux pans de papier peint. Je t'aime ne se dit pas.
Intérieur avec couple et paravent
À la dissimulation du paravent, je préfère la tendresse des mains dans le dos.
Xylographies
Ses xylographies (il est fun, ce mot !) accentuent ce qui est peut-être la seule caractéristique commune de ses peintures : la prégnance du trait et des aplats de couleur pour ce que le panneau de la première salle définit comme une « peinture du contour ». Les vignettes produites sont à mi-chemin entre Tintin, Persepolis et les illustrations des pièces d'Oscar Wilde ! Parce qu'elles semblent préfigurer la bande dessinée et sont présentées dans la dernière salle du rez-de-chaussée (comment ça, y'a encore un étage ?), on a l'impression que ces gravures constituent l'aboutissement de son travail alors qu'elles sont en réalité antérieures à la plupart des peintures.
La Paresse
Je n'aurais pas été surprise de trouver cette gravure illustrant une anthologie d'Oscar Wilde.
Le Feu d'artifice
Toutes ces petites têtes avec chapeaux et fichus ne vous rappellent-elles pas celles de Persepolis ?
Le Trottoir roulant
L'enfer de la modernité
Le Grand Moyen
Cinq heures
Chez Vallotton, on fait toujours l'amour à cinq heures.
FV ou le cheveu Van Gogh
Portrait d'Edgar A. Poe
La Mer et le noir soleil de la mélancolie
Et puis aussi, en vrac...
Lavandières à Étretat
Le Ballon
À Édimbourg, je suis passée sur un pont surplombant un immense jardin où un père et son enfant jouaient au ballon. L'ombre des arbres, la lumière... c'était exactement ça.
Verdun futuriste
12:41 Publié dans Souris de médiathèque | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : exposition, expo, peinture, vallotton, grand palais