19 avril 2014
Otello à cor et à cri
J'irais bien à Murano. Ce souvenir private joke1 de Venise est la première chose qui m'est venue à l'esprit lorsque le rideau s'est levé sur un lustre façon verre de Murano. C'est à peu près le seul élément notable de la mise en scène de l'Otello présenté au théâtre des Champs-Elysées et, n'était le massacre de chaises au dernier acte (je prie pour ne jamais me réincarner en chaise de théâtre), on se rappellerait avoir connu des versions de concert plus animées. Pour une fois, le tiers manquant de la scène ne m'a pas manqué plus que cela.
Scène vide, mise en scène statique, flat characters chantés par des personnages en chair et bonus diva, je crois que je ne m'étais jamais autant approchée de la caricature – il faut dire que je m'étais toujours méfiée des opéras italiens jusque-là. Quitte à faire hurler les mélomanes, autant avouer que j'ai eu l'impression de voir les Feux de l'amour à l'opéra, version ritale, avec ego de coq et scooter dans la ruelle : aussi extrêmes soient les manifestations de leurs sentiments, Otello, Desdemona et Rodrigo ont la maturité émotionnelle d'ados de 15 ans – Desdemona finira d'ailleurs par taguer le mur de sa chambre.
Pourquoi, alors, n'a-t-on pas envie de partir à l'entracte ? La musique. Non pas les instruments d'époque, qui se mettent parfois à barrir (cors ?) ou à émettre des sifflements stridents (flûte ?), mais la partition de Rossini, qui nous emporte aussi bien que le ferait aujourd'hui une comédie musicale bien menée2, avec en prime un trio de chanteurs (John Osborn, Cecilia Bartoli, Edgardo Rocha) qui n'ont pas froid aux yeux ni à la gorge. Même la voisine ultra-élégante de devant swinguait de la tête. Après la Petite messe solennelle, Otello me conforte dans mon envie de découvrir Rossini – peut-être ne commencerai-je pas par l'opéra, voilà tout.
1 Phrase prononcée devant à peu près chaque lustre en verre de Murano vu à Venise, jusqu'à ce qu'on prenne le vaporetto jusqu'à l'île de Murano – très mignonne au demeurant.
2 Je verrais bien John Osborn, Otello en tenue de militaire-garagiste, dans un remix de Top Gun : sa démarche aux saluts collait parfaitement.
16:34 Publié dans Souris d'Opéra | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique, opéra, tce, otello, rossini